Effinergie® BBC, chronique d’une mort annoncée ?
Ce titre quelque peu provocateur n’illustre qu’un point de vue, par essence tronqué, voire ironique. Effinergie®, l’association initiée par différentes régions françaises et le C.S.T.B. me paraît révéler par sa syntaxe une erreur historique et une contradiction sémantique :
Le label Effinergie®BBC, pour bâtiment basse consommation, s’est inspiré du label Minergie® de nos amis suisses, lequel converge désormais judicieusement, avec Minergie® P, vers l’habitat passif. Sous l’angle chronologique, ce dernier est lui-même apparu après son homologue allemand Niedrigenergiehaus et après l’exigeant label Passivhaus avec lequel Minergie® tout court ne peut être confondu.
Pourquoi cette inspiration ? Sans doute parce que l’on ne pratique plus assez en France la langue de Goethe et que, seule la littérature accessible, rédigée en français en matière d’habitat basse consommation, était disponible chez nos voisins helvètes qui, du reste, forts de leur importante expérience, ne nous ont pas attendu pour innover en proposant Minergie® P Eco. Or, si l’on souhaite ramener l’ensemble du parc immobilier à une moyenne de besoin en chauffage de 50 kWh/m².an, sachant que l’on sait que nombre de bâtiments anciens, soit l’essentiel du parc actuel, ne pourra prétendre à la très basse énergie, en particulier les bâtiments classés aux façades impossibles à isoler par l’extérieur, il est illusoire de vouloir construire aujourd’hui le neuf avec un besoin de 50 kWh/m².an, même à considérer la prise en compte des postes auxiliaires (eau chaude sanitaire, ventilation, éclairage) s’il s’agit d’atteindre cette moyenne pour tout le parc en 2050.
Si vous avez lu la présentation initiale d’Effinergie®, vous vous direz peut-être, qu’après tout, la variété des conditions climatiques en France pourrait postuler, à première lecture, une variation des exigences. Or il n’en est rien, un besoin en chauffage et rafraîchissement inférieur à 15 kWh/m².an peut-être aussi bien satisfait à Barcelone qu’à Göteborg ainsi que le démontre le référentiel Passivhaus, applicable tant au nord de l’Europe que pour les climats chauds européens.
Effinergie® ne devrait-ce pas être la conjugaison des termes efficacité et énergie ?
Les maisons passives existent depuis plus de 15 ans en Allemagne. On s’est évertué, semble-t-il, à réinventer la roue pour concevoir un label moins efficace sur le plan énergétique sans profiter de l’immense expérience allemande librement accessible et reproductible. Surtout, une convergence vers l’habitat passif pour le neuf permettrait de diminuer les coûts par la mise en commun des ressources techniques et modalités de constructions en direction des entreprises françaises, le passage facilité des frontières des entreprises européennes du secteur. Quel temps faudra-t-il donc à Effinergie® pour admettre notre appartenance à l’Europe, l’évidence et la supériorité des critères érigés par le Passivhaus Institut, soutenus par la Commission européenne, et nous proposer, un label dénommé, sans grande originalité, Effinergie® P ?
Enfin, cette analyse, toute personnelle, me semble confortée par la parution du très instructif rapport de Christian CHARIGNON, architecte urbaniste, dénombrant les freins à la construction vers le passif et le durable.